Pour y parvenir, des mesures drastiques ont été prises, à juste titre, et toute la chaîne immobilière, dont le secteur de la construction fait partie, s’est brusquement retrouvée à l’arrêt. Cet arrêt a des conséquences importantes, puisque le secteur belge de la construction emploie plus de 279 000 personnes et représente 4,8 % de notre produit intérieur brut. Cependant, le secteur de la construction n’est qu’un maillon de la chaîne immobilière qui comprend aussi les urbanistes, les architectes, les ingénieurs, les fabricants de matériaux, les distributeurs, les transporteurs, les services publics, les courtiers, les financiers, les assureurs, etc. Cette chaîne immobilière représente 369 000 emplois et 13 % de notre produit intérieur brut !
Par conséquent, une deuxième priorité doit être traitée d’urgence. Des mesures doivent être prises pour réactiver l’activité économique dans les chaînes de valeur dites non essentielles. En particulier dans les chaînes où les risques de santé sont limités et où les risques de santé induits – comme l’utilisation des transports publics – sont limités.
Une telle approche nécessite de ne pas raisonner par secteur, mais bien en couvrant l’ensemble d’une chaîne de valeur. Voici un certain nombre de mesures pragmatiques que le gouvernement peut prendre à court terme pour revitaliser la chaîne immobilière.
1. Ajouter le notariat à la liste des “Secteurs critiques et services essentiels”.
Dans la pratique, on constate que les notaires exercent souvent leurs fonctions à distance et que les clients sont prêts à signer des documents juridiques par voie électronique. Les notaires peuvent, sous réserve bien sûr de la distanciation sociale, poursuivre leurs activités et travailler avec des procurations signées numériquement. Les notaires restent également actifs dans d’autres pays européens, notamment en Allemagne et au Luxembourg. Il n’y a donc aucune raison de continuer à reporter l’exécution des actes.
2. Permettre aux cabinets d’architectes de continuer à travailler s’ils le souhaitent.
Certaines professions réglementées peuvent paralyser l’ensemble de la chaîne de valeur. Par exemple, l’Ordre des architectes a demandé à ses membres de suspendre tous les travaux, ce qui a entraîné la fermeture des chantiers. Dans la pratique, on constate cependant que de nombreux bureaux d’architectes et d’ingénieurs techniques continuent à travailler. Les prestataires de services dans les secteurs de l’immobilier et de la construction peuvent poursuivre leurs activités en toute sécurité. Les études et les réunions peuvent avoir lieu via le télétravail. Et lorsqu’il s’agit d’inspections de sites et de livraisons, il est possible de demander à chaque partie concernée de faire une visite séparée et de rassembler les résultats dans un seul document numérique.
3. Accélérer les procédures de permis pour démarrer un plan de relance.
Sans permis, aucune activité économique n’est possible. Les procédures de planification et d’autorisation et les documents connexes sont disponibles digitalement aux services de l’environnement et de l’urbanisme et peuvent être transmis par voie électronique. Les citoyens peuvent soumettre leurs objections par voie numérique. Il n’y a donc aucune raison de prolonger les procédures. Au contraire, retarder la délivrance de permis ne fera que retarder la reprise économique tant nécessaire. Si nous ne continuons pas à travailler sur les permis maintenant, nous aurons un nouveau problème dans six mois, car alors il y aura trop peu de projets autorisés et donc moins de travail. Exhortons donc toutes les administrations à traiter les demandes de permis correctement mais surtout rapidement.
4. Redémarrer rapidement les chantiers de construction.
L’activité sur les chantiers a été considérablement réduite, principalement en raison des grands entrepreneurs qui ont très rapidement cessé toute activité. Envoyez un signal politique clair indiquant que les entrepreneurs sont censés poursuivre leurs activités au maximum tout en respectant les règles de distanciation sociale. Et lorsque ce n’est pas possible, l’utilisation de masques peut apporter une solution, comme en France et aux Pays-Bas
5. Remettre à niveau la production et la distribution de matériaux de construction.
La production et la distribution de matériaux de construction sont au point mort. La Confédération Construction affirme que seulement 8 % des entreprises disposent de suffisamment de matériaux pour continuer à travailler. Envoyez un signal politique clair indiquant que les producteurs et les distributeurs de matériaux de construction peuvent poursuivre leurs activités tout en respectant les règles de distanciation sociale. Et que le secteur de la logistique doit contribuer à la reconstitution des stocks de matériaux de construction.
6. Demander aux services semi-publics de montrer l’exemple.
Dans de nombreuses entreprises de services publics, eau, gaz, électricité, toutes les interventions non urgentes ont été arrêtées. Par conséquent, non seulement les chantiers de construction s’arrêtent, mais les maisons et les appartements n’arrivent plus à être connectés aux réseaux. Il s’agit toutefois d’une des dernières étapes avant la livraison des maisons et des appartements. Envoyez un signal politique clair que les services publics doivent poursuivre leurs activités tout en respectant les règles de distanciation sociale. Un tel message du gouvernement, qui est souvent actionnaire de ces entreprises de services publics, serait un signal fort.
7. Veiller à ce que les showrooms puissent fonctionner en toute sécurité sur rendez-vous.
Les clients privés ne peuvent pas faire les choix nécessaires car les showrooms des revendeurs de salles de bains, de carrelage, de sols et de cuisines sont fermés. C’est un goulot d’étranglement dans la finition des maisons et des appartements. Faites que ces points de vente puissent ouvrir, à condition que ce soit sur rendez-vous et que les mesures nécessaires soient prises pour respecter la distance sociale. Ceci ne devrait pas être difficile dans les grands espaces avec peu de visiteurs. Acceptez également le déplacement du client vers le showroom comme un déplacement essentiel, sous réserve d’une invitation personnelle à titre de preuve.
8. Redémarrer les activités des agents et courtiers immobiliers.
Les visites de maisons et d’appartements témoin avec les vendeurs ne sont plus autorisées. Résultat : le nombre de transactions immobilières a fortement diminué. Redémarrez les activités des agents et courtiers immobiliers, à condition qu’ils travaillent sur rendez-vous et, si nécessaire, qu’ils permettent au client de voir librement le bien. Acceptez également le déplacement du client vers une maison ou un appartement témoin comme un déplacement essentiel.
9. Autoriser la livraison d’un domicile.
Aujourd’hui, le particulier n’est pas autorisé à se déplacer à son futur domicile qui doit être réceptionné. Par conséquent, les clients ne peuvent pas emménager dans leur nouveau logement, bien qu’ils aient souvent un délai très serré pour quitter leur ancien logement. Moyennant un peu de bonne volonté, telles que des visites séparées, la réception de chantiers peut se poursuivre dans le respect de la distance sociale.
Les secteurs mentionnés ci-dessus, qui ensemble forment l’une des chaînes de valeur les plus importantes de notre économie, peuvent, avec positivisme, créativité et détermination, respecter la distance sociale demandée tout en relançant leurs activités. Il n’y a donc aucune raison de suspendre l’exécution de nombreuses activités, sauf si les conditions de distanciation ne peuvent vraiment pas être remplies.
C’est pourquoi nous suggérons un signal politique fort indiquant que nous sommes tous responsables de faire tout ce qui est en notre pouvoir, strictement dans le cadre des mesures imposées, pour remettre notre économie à flot. Cela est notre responsabilité civique. Ne nous endormons pas dans l’attente d’un plan de relance majeur, mais démarrons-le dès aujourd’hui partout où c’est raisonnablement possible. Parce que si tout le monde se met à attendre les autres, nous n’y arriverons pas.
Voir l’article sur : https://www.lalibre.be/economie/decideurs-chroniqueurs/si-tout-le-monde-se-met-a-attendre-les-autres-nous-n-y-arriverons-pas-5e96c868d8ad584f6e0dd762